QUEENS
POV Cassidy
Comment je me suis retrouvée agent de la Team Rocket? Et bien... On a tous notre propre histoire, et elle est rarement belle et heureuse. Je pourrais vous dire que c'est à cause d'elle, de Jessie, mais ce serait me voiler la face, et je suis trop belle pour vous priver de mon visage parfait et sans défaut... Non, je crois simplement qu'à cette époque là, j'avais des problèmes, et qu'ils m'ont poussé vers l'organisation. On a tous des problèmes, me direz-vous, et on ne devient pas forcément un criminel pour autant : qu'ils soient amoureux, financiers, familiaux, peu importe, tout le monde en a, mais moi, j'en avais bien plus que les autres, du moins, c'est l'impression que j'avais. Je n'essaie pas de me trouver des excuses, croyez-moi : ma mère et ma sœur était deux vraies morues : tout le reste découle de ce fait. Et puis, j'aime mon métier, le frisson, l'argent, la liberté, et en tant qu'agent, je suis douée, je n'y peux rien. C'est tout.
Jadielle, 19 septembre 1991
Ce jeudi matin, l'opaque brume épaisse qui avait infiltré la ville rendait les immeubles presque invisibles. Le vrombissement des voitures semblait venir de partout et nulle part dans les rues désertes, tandis que l'on pouvait apercevoir par endroit des Tadmorv s'engouffrer dans une bouche d'égout, des Rattata dévaler les caniveaux à toute vitesse, ou encore des Miaouss bondir derrière les poubelles surplombées de Smogos, effrayés par les véhicules fendant le brouillard. Ça et là, sur les trottoirs pavés, des citoyens matinaux emmitouflés se pressaient vers les boulangeries ou les écoles tels des silhouettes fantomatiques, accompagnés de leurs Pokémons curieux. Sur l'épaule d'une vieille dame, sortant du "Pain-despiègle", se tenait un Piafabec, picorant le quignon de la baguette chaude, tandis qu'elle saluait un petit garçon à vélo, portant un uniforme, dont le Nidoran mâle dormait dans le panier, recouvert d'une petite couverture. Devant le centre Pokémon, l'infirmière Joëlle qui avait assuré la garde de nuit bayait bruyamment, enfourchant sa bicyclette tandis que sa remplaçante prenait le relais, Leveinard préparant le café. D'un bref signe de main, elle salua l'agent Jenny et son Caninos, qui entamaient leur première ronde de la journée.
La ville n'était pas encore totalement réveillée, à l'inverse des Polichombr s'endormant dans les greniers, tandis que les premiers rayons du soleil caressaient le brouillard, lui donnant une chatoyante couleur orangée. Dans les campagnes alentours, les plus jeunes Mystherbes courraient après les Paras dans l'herbe humide des jardins, ce qui avait le don d'agacer les Dardargnans et les Papillusions, qui somnolaient encore sur les branches. Partout, du centre ville aux bois environnants, la brume s'était répandue, et les Pokémons comme les humains babillaient au rythme lent d' "Info Kanto", l'émission matinale s'animant sur chaque télévision jusqu'à la lisière de la foret de Jade. Puis il y avait la montagne, où seul le silence absolu régnait en maître du matin jusqu'au soir, à l'exception du lent clapotis de l'eau dévalant la cascade, et de quelques grognements d'Absols ou de Rhinoféros, si l'on en croyait les plus téméraires des dresseurs qui s'y étaient déjà aventuré....
Chapitre 1
Chapitre 2
" You must be an angel... I see it in your eyes..."
"Go on girl!" ♫
"Hey pretty baby with the high heels on
You give me feverLike I've never, ever known..."
"You're just a product of loveliness
I like the groove of your walk,Your talk, your dress..."
Sur les paroles de son amie, la jeune adolescente lança un regard par dessus son épaule, et alors elle la vit, de même que tous les élèves présents se retournèrent afin de la voir traverser le couloir, comme s'il s'agissait d'Arceus en personne, formant presque une haie d'honneur. Soudain, le brouhaha ambiant cessa, faisant place à un silence pesant, entrecoupé par le claquement de ses talonnettes sur le sol carrelé. Grande, longiligne, avec ses longs et soyeux cheveux blonds bouclés en arrière, Cassidy était impeccable, parfaite, de ses yeux améthystes en amande à ses ongles de pieds parfaitement french-manucurés, en passant par son look travaillé avec soin : même en portant comme les autres l'uniforme, il paraissait sur elle infiniment plus stylé.
Si sa plastique n'avait aucun défaut et faisait tout autant pâlir de jalousie les filles que rougir d'envie les garçons, son intelligence, ses talents de dresseuse et son charisme n'étaient pas en reste : meilleure étudiante de l'école depuis son entrée en sixième, présidente du conseil des élèves pour la troisième année consécutive, chouchoute des professeurs et capitaine de l'équipe de cheerleaders, Cassidy imposait le respect parmi ses camarades : la fille la plus populaire, enviée et crainte, c'était elle, et nombreuses étaient ceux et celles qui se battaient pour avoir ne serait ce que le privilège de manger à sa table, ou encore de susciter son intérêt afin qu'elle ne vienne faire profiter de sa simple présence à une soirée.
En passant devant les deux adolescentes plantées devant l'affiche, elle leur lança un sourire méprisant, avant de continuer son chemin, replaçant ses cheveux derrière son oreille dans un geste distingué. Elle s'arrêta enfin devant une salle de classe tandis que les bavardages reprenaient, et tendit son bras d'un air nonchalant, alors qu'un jeune garçon roux qui la suivait depuis le début à la trace accrocha un sac à main en peau de Crocorible à son bras frêle entouré de plusieurs bracelets.
"- Merci Eddy, mon chou, je termine à 13h, ne soit pas en retard!"
L'adolescent constellé de tâches de rousseurs rougit alors tout en souriant bêtement, glapissant un "Bien sur Cassidy, à tout à l'heure Cassidy..." tandis qu'elle s'engouffra dans la salle en l'ignorant comme s'il était devenu inexistant à partir du moment où il n'eut plus d'utilité. Mais à peine eut-elle mis un pied à l'intérieur qu'une femme brune, très grande, d'une quarantaine d'année à l'air sévère la retint par le bras
"- Aïe! Madame Jabotte, j'ai cours de chimie!
- Et bien, être responsable des élèves n'inclut pas que des privilèges, Mademoiselle Peverell. Une jeune fille vient d'arriver, elle intégrera le deuxième cycle. Je compte sur vous pour la conduire à sa chambre, et lui expliquer les modalités, elle vous attend au bureau. Mais avant cela, je crois que nous devrions avoir une discussion vous et moi. J'ai appris que vous vous étiez blessée lors des dernières répétitions, est-ce exact?"
L'oeil brillant et empli de méchanceté de la femme ressemblait drolement à celui d'un Cornebre. Elle posa ses mains ridées sur ses hanches maigres, menaçante, lorsque Cassidy reprit, lui tenant tête.
"- Les nouvelles vont vites! Effectivement, Madame, mais je vous rassure, tout est sous contrôle. Ce n'est qu'une légère entorse, je me ménage : Mr McGregor s'est gentiment proposé pour porter mes affaires, je serais opérationnelle pour l'ouverture des matchs.
- J'ai en effet pu observer votre larbin à l'oeuvre, mais force est de constater que vous souffrez et que nous ne portez pas d'écharpe. Sauf votre respect et malgré votre dévotion, il va vous falloir désigner une remplaçante pour samedi, à moins qu'un médecin agréé ne vous autorise à être sur le terrain, mais nous aurons l'occasion d'en rediscuter, j'ai du travail. Vous avez les clefs, n'est-ce pas?"
Une fois la directrice adjointe disparue, Cassidy poussa un long soupir avant de fouiller avec difficulté dans son sac à la recherche des clefs du bureau, son épaule la faisant terriblement souffrir depuis qu'elle était malencontreusement tombée du haut de la pyramide humaine vendredi lors d'une répétition. Elle avait beau prendre sur elle et feindre la douleur, cette chute était remontée jusqu'aux oreilles de la direction : sûrement un coup de Joséphine, ou peut-être de Paloma? Cela pouvait provenir de la langue de Seviper de n'importe quelle greluche de l'équipe après tout, chacune d'entre elle ne désirant qu'une chose : devenir elle aussi l'espace d'une soirée Cassidy, la star et la capitaine des NidoQueens. Depuis deux ans maintenant, tous les moyens étaient bons pour tenter de l'évincer! Quelle poisse! Quel docteur allait-elle devoir séduire maintenant pour obtenir cette autorisation? Il était tout simplement hors de question qu'elle reste sur la touche, pendant que ces cruches encourageraient l'équipe de dresseurs de l'école en enchaînant SA chorégraphie. C'était impossible, tout simplement mort. Et c'est d'un pas énergique et enragé que la jolie blonde fonça en direction du bureau, bien décidée à se débarrasser au plus vite de cette nouvelle élève dont elle n'avait que faire.